C’est ce que dit ma mère quand se prépare l’orage.

Cette semaine, j’avais envie de renverser les runes et d’écrire sur les bienfaits des applis de rencontre : après tout, elles m’ont ouvert des portes pour explorer la sexualité que mon jeune âge adulte m’avait gardé fermées. Souvent en couple, toujours timorée, je n’ai jamais décroché de rôle dans la sitcom amoureuse de mes potes d’université. Spectatrice, je sais faire.
J’avais envie d’écrire pour célébrer l’amour libre qui revit au hasard d’une rencontre, quand on se profile en-dehors d’un profil, quand le grain de la peau révèle davantage que la marque de la moto. J’appelle ça l’amour libre, oui. Quand on ne se connaît pas, on se découvre mieux. On effeuille les habitudes et les attentes, on ne pave pas la voie aux noces, on voyage léger ; j’avais envie de parler du Sexe pour le Sexe comme on parle de l’Art pour l’Art.
Je saluais cette ère de permissivité que les femmes, au premier chef, apprivoisaient avec entrain et précaution, pour n’avoir jamais été aussi libres de s’afficher comme sujet désirant. Être le sujet et non l’objet, dire JE, accorder les verbes en temps et en personnes, nommer, se faire exister.
Puis la décision de la Cour Suprême des États-Unis est tombée.
Le vent tourne.
Les permissions ne sont jamais que ça, des permissions.
Qu’on criminalise l’avortement ou qu’on installe plein de freins pour empêcher les femmes d’y accéder, c’est qu’on ne les considère pas aptes à choisir. Indignes, légères, putassières.
Nous sommes encore l’objet. Un objet entre les mains d’une frange de la population de plus en plus fâchée — fâchée contre les femmes, contre les minorités, contre les institutions, contre les perspectives d’avenir qui déchantent.
Je suis accablée.
Partout, partout, le temps se salit.
Sur tous les fronts, les horizons
L’oeil ne trouve plus rien qui soit
de belle augure.
Il faut se promettre l’entraide
et la solidarité
tout de suite.